Jeanne n’empoisonne pas la vie de Maurice

Hé Ho on n’est plus au Moyen Age, s’exclame Maurice, les fantômes ? c’est des c…….. -  je corrige puisque l’on était au Moyen Age - des balivernes.

Maurice habite avenue de la République, après ses grands-parents et ses parents, sans souci particulier. Et un jour il apprend l’existence de Jeanne.

Il était une fois ……

Jeanne, la fille de parents Renault, vignerons aisés habitant St Amand,  qui a eu une enfance gâtée.

Elle se marie à 20 ans avec Eugène Gilbert fils de vignerons eux aussi aisés, au Domaine de la Châtelette à Bruère ( * ) et ont Aline en 1898.

Oui bon d’accord, c’est une vieille histoire !

Ils s’installent à la Châtelette, cadeau des parents d'Eugène qui ne conservent qu'un petit logement dans la ferme, et leur versent une rente annuelle de 400 Francs / 1 570 €. Vraiment pas élevé !

Mais Jeanne s’ennuie à Bruère, ne fait pas grand chose dans la maison et voudrait une vie plus luxueuse. Eugène s'en plaint à la famille qui essaye d'arranger les choses, en vain, Jeanne a, comme on dit, un caractère de cochon ( enfin ... de treue, bin d'cheu nous en Berry ).

En 1905, le père Gilbert meurt après 3 jours de souffrance, sa femme résiste mais meurt un peu plus tard après une nuit de souffrance. Jeanne pleure ses beaux-parents et devient propriétaire de la Châtelette.

En 1906, son père meurt après 3 jours de souffrance, sa mère très malade en réchappe, mais quelques mois plus tard meurt après 2 jours de souffrance.

Jeanne pleure ses parents et peut enfin  réaliser son rêve : habiter St Amand, avenue de la République dans une maison spacieuse avec un beau jardin.

Les Palleau, cousins de la famille Gilbert, habitent St Amand un peu plus haut dans l'avenue de la République, les Varennes, en face de l’auberge. Ils n'apprécient pas beaucoup la Jeanne paresseuse.

En 1908, Madame Palleau meurt après 3 jours de souffrance. Monsieur Palleau après une journée et une nuit de vomissements en réchappe.

Jeanne a régulièrement du fromage que lui fournit son fermier de la Châtelette. Elle en distribue beaucoup à la famille. Et le fromage a un drôle de goût. Une tarte aux prunes aussi curieusement. Et les familles vomissent beaucoup, puis meurent.

Le docteur qui pensait jusqu’à présent avoir affaire au fil des années à des intoxications alimentaires commence à se poser des questions. C’était temps ! Et le Père Palleau se souvient des attitudes de Jeanne avec les fromages et de la tarte aux prunes, qu'on retrouvait posés sur le rebord des fenêtres.

Sous un banc de l'auberge les Varennes, un pensionnaire trouva un sac composé de feuilles avec une poudre blanche. Il paraît qu'il a crié d'abord chic ! chic de la coke mais a déchanté très vite.

La marée-chaussée est prévenue et l’enquête commence sur la base de soupçons :  on trouve chez Jeanne le registre dont la page déchirée contient l'arsenic, enveloppée dans le sac d'un épicier qui avait vendu des pruneaux à Jeanne. Le reste de fromage de chez Palleau, analysé, donne une quantité d’arsenic énorme.

Dans les chaumières ça cause et l'effervescence gagne le saint-amandois, surtout avec l'exhumation des morts : dès 6 h du matin une foule se dirige vers le cimetière de St Amand, dans les champs à côté, les jeunes grimpent aux arbres pour mieux voir. Mais on ne voit rien ! il est constaté de l’arsenic dans les corps, même chose au cimetière de la Celle, pour Madame Gilbert, mais pas lui.

Le droguiste Bouillot confirme la vente de mort-aux-rats à Jeanne ( qui avait donné un faux nom ), qu'il reconnaît formellement comme l'acheteuse.

elle a un joli chapeau de deuil ( !!  ) la Madame, et les gendarmes de 1909 ont de jolies moustaches

Tout Saint-Amand - ou presque - se retrouve au procès à sensation à Bourges. Ben dame ! c'est quand même une sorte de fête, aussi bien que les Foires d'Orval.  Jeanne a beau répété sans arrêt son innocence malgré les preuves et divers témoignages, elle est condamnée aux travaux forcés à perpétuité.

Youpi !!!! St Amand devient célèbre grâce à l’Empoisonneuse.

En 1909, Eusèbe Gilbert obtient la déchéance de mère de Jeanne et sa fille Aline devient propriétaire de la maison.

Jeanne meurt en 1917 dans la prison de Rennes, et son voile blanc s’envole gracieusement vers sa chère maison, qu’habitaient les grands-parents de Maurice.

Peu convaincu de la présence d’un voile blanc qu’il n’a jamais vu, personne ne lui empoisonnant la vie, Maurice à l’esprit cartésien, vit paisiblement après une carrière en Suisse, partageant son temps soit à la CH voir ses filles, soit au jardin avec la cousine Marie-Claude, soit à la foire aux vins, toujours avec la même cousine, accompagné de Josy et de bien d'autres, dont moi.

Et je vous prie de croire que ça se passe vachement bien !

( * )  Il est amusant de noter que la Châtelette est aujourd’hui habitée par une famille Gilbert – eh oui encore … - mais sans lien avec la Jeanne !

                                                                                   *

PS      10 ans plus tôt il y eut un crime encore plus célèbre à Jariolles : 9 personnes égorgées dans l'auberge, un soir d'époque de Foires d'Orval de St Amand. Coupables introuvables. Mais je ne vais quand même pas faire de comparaison en fonction du nombre de morts.... A part ça, le Cher est calme.

Comments

[Clément]

Merci Pierre pour ces histoires extraordinaires, comme disait un autre Pierre (Bellemare). Masi n'oublie pas le meurtre du couple non élucidé rue Sarrazin : 87 coups de couteau ! Jacques Prévost a reçu 27 coups de couteau et son épouse, Thérèse, 60. Le ou les auteurs ont même tenté de décapiter cette dernière. Cadavres découverts quatre jours après, par des amis du couple.

[le grizzly]

Halan Florisse, 19 ans, accusé du meurtre des époux Prévost le 25 janvier ( analyse ADN + objets volés retrouvés chez lui ), détenu depuis le 19 mai 2010, s'est suicidé par pendaison en juillet 2010 à la prison de Liancourt.